mardi 31 mai 2011

Peinture murale - Mural - Escola Popular Aruna Embalo


Une journée chaude de juin 2010. Nara Lee, Aruna et moi-même étions en piste! tôt le matin, nous étions partis de Bissau, casés à qui mieux mieux dans une auto huit places crême qui en avait vu d'autres, pour aller à la rencontre d'une amie pas vue, ni touchée, ni sentie depuis 7 années pleines. Il ne fallait pas qu'on se loupe! Par téléphone, nous avions convenu du lieu du rendez-vous: Embranchement des routes qui mènent à Bambadinca et à Bafatá. Le préchauffage de l'auto à peine terminé et voilà que, par un tour de passe passe qui lui est propre, notre Nara s'endort. Au coup de clé supplémentaire, la Nara est déjà bien loin. C'est le genre de fille qui préfère rêver le paysage plutôt que de le voir. La route est neuve, le paysage déroule, sec mais amical. Au stop "réglementaire" de Safim ; une simple corde au milieu du chemin, je m'aperçois que - je ne sais dire si c'est comme d'habitude ou par habitude -, j'ai oublié mon passeport (encore un incident a rajouter à la longue liste des misérables fois ou j'ai été arrête faute de papiers en règle: Cholet, Lisbonne, Baltimore, Newark). Tous les voyageurs qui sortent des autos ou des bus collectifs passent à la queue leu leu, devant deux douaniers affalés l'un devant l'autre sur des chaises en plastique (Passer en jeep et personne ne vous dira rien).
Je baragouine gentiment quelques mots au premier et lui explique que j'ai les poches vides (ce qui n'est pas vrai). Il me regarde. Moi aussi je le regarde, et je vois bien qu'il n'est pas en bonne santé. Il devrait mettre une casquette et cesser d'embêter les gens de la sorte. Encore deux coups de la sorte et il va se taper un ulcère ! L’Irã en bois que j’ai dans la poche commence à faire son effet, son collègue me fait signe de reprendre la route. Zou, on reprend la route. Pourquoi cette "frontière" à l'intérieur du pays? On le saura bien assez tôt. Qu'importe, plutôt prendre cette route qui longe le fleuve Geba tous les jours que les dieux font, plutôt que n'importe quel autre trajet de misère.
On roule. Je note les noms des tabancas: Nhoma, Cã Grande, Jugudul, Sincha Bessunha, São Belchior...
Nara a d'autres noms en tête. Impossible de savoir.

Nous arrivons au lieu du rendez-vous (une sorte de centre du monde à ce moment-là précis)

Elle est là. Plus belle que jamais. Aucune envie ici d'en faire un plat ou de palanquer ici une collection d'adjectifs tous aussi inutiles les uns que les autres. Faisons bref: elle me plaisait. Elle me plait plus encore! Elle nous attendait. Et nous savons aussi qu'elle nous attend depuis un moment. 
En ce lieu, à quelques encablures à l’ouest du fleuve Geba, nous parlons, nous rions. Il faut savourer ce moment. C'est un bon plat de nourriture pour les mois de disette qui s'annoncent. Nous le savons tous. Flûte!
L'instant aura dure deux heures. 
Quelques passants viennent ponctuer notre rencontre; Un homme fou qui délire dans un patafouillis de Crioulo et de Portugais, et que notre amie savoure, et un gars des douanes (encore un), qui se croit permis d'entrer dans notre conversation. Ouste! Non! Pas aujourd'hui.   

Notre amie est repartie (combien de jours, de mois, d'années avant de la revoir? Surtout ne pas compter. Simplement attendre). Nara et Aruna se reposent sur le bord de la route. Sans Aruna, je n'aurais jamais pu revoir cette amie. Il est aussi content que moi. Et moi je suis content d'avoir un ami comme lui. Il ne boit pas, je bois. Il prie et moi surtout pas. Mais voilà, on se comprend en frères que nous sommes.
Plus tard, lorsque nous revenons vers Bissau, tous les deux installés à l'arrière d'une camionnette, il est en face de moi. Il ne dort que d'un oeil. Celui de gauche surveille les histoires incroyables qui jalonnent notre retour vers Bissau. Aruna est un jeune gars, mais c'est déjà un vieux sage. 


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